Depuis novembre 2018, La Cloche Grand Est réunit des commerçants acceptant d’offrir de petits services du quotidien à des personnes en situation de grande précarité, au sein de son réseau solidaire baptisé le Carillon. Mais l’association organise également des temps-forts ouverts au public tout au long de l’année. Des espaces de rencontre qui permettent de créer du lien, pour des personnes isolées, souvent. Mercredi dernier, c’était tournoi de pétanque près du campus universitaire.
Square du président Allende, plusieurs parties battent leur plein en cette fin d’après-midi. De la pétanque et du ping-pong près de l’air de jeu, du Mölkky du côté de la rue de l’Abreuvoir. La rumeur des conversations étouffées par les masques est ponctuée du fracas métallique des boules qui s’entrechoquent et du cliquetis des quilles fauchées. Ce mercredi, ils sont une quarantaine à avoir répondu à l’invitation de la Cloche Grand-Est, organisatrice de l’événement. Des bénévoles, des sympathisants mais aussi des bénéficiaires de l’association.
La Cloche est l’association à l’origine du Carillon : un réseau de commerçants solidaires acceptant de rendre de petits services aux personnes en situation de grande précarité. Ce peut-être recharger son téléphone, laisser ses affaires pour la journée ou encore réchauffer un plat. Certains membres du réseau proposent également des produits suspendus c’est-à-dire des cafés, repas ou autres, payés par des clients en plus de leurs consommations. Mais l’association organise aussi des moments conviviaux tout au long de l’année, « sans distinguo entre aidants et aidés, personnes en situation de grande précarité ou non, détaille Gabrielle Ripplinger, directrice de la Cloche Grand Est. C’est une façon de créer du lien différemment. De sortir de l’entre-soi aussi, pour ceux qui sont en accueil de jour où en hébergement d’urgence. “
« C’est la seule association où on peut prendre le temps de discuter comme ça en ce moment »
Ce tournoi de pétanque est le premier événement organisé par la Cloche depuis la fin du confinement. Pascal, Yannick, Marc et Hamza* en profitent. Tous les quatre utilisent régulièrement les services proposés par le Carillon. Certains d’entre eux y sont également bénévoles. Ils ont d’ailleurs passé l’après-midi avec Gabrielle Ripplinger et Laura Buschmann, coordinatrice terrain, pour préparer quelques cakes salés à offrir aux participants. L’occasion de discuter entre eux, le temps que les préparations cuisent.
« J’aime bien venir à la Cloche passer le temps et rencontrer d’autres personnes, glisse Pascal. Quand vous êtes dans la rue, la vie sociale c’est important. Parce que dans la rue, personne ne vous aide. La solitude est quelque chose qui pèse beaucoup. » Marc hoche la tête en l’écoutant puis détaille sa situation. Lorsqu’il a fini de payer son loyer et ses charges, il ne lui reste que 50 à 70 euros pour vivre. Il va régulièrement aux Restos du cœur et utilise les services du Carillon mais n’en parle pas autour de lui. « Il y a une forme de stigmatisation, regrette-il. Un côté « oh mais ceux-là, c’est des clodos », et moi j’ai pas envie de passer pour le clodo de service. » Il vient à la Cloche pour rencontrer « d’autres personnes ». Comme Yannick et Hamza. Pour discuter de tout et de rien. Des échanges qui leur ont particulièrement manqué pendant le confinement.
« Il y a eu beaucoup d’initiatives à cette période. Beaucoup de choses qui ont été faites, énormément de distribution de nourriture, se souvient Hamza. Mais c’était pas forcément toujours ce dont on avait besoin. C’était distribution et point. Niveau lien social c’était compliqué. » Selon lui, ça l’est toujours d’ailleurs. « Avec les mesures sanitaires liées au Covid, il y a beaucoup de structures où on nous demande de partir après le repas, alors qu’avant on pouvait rester à parler au moment du café. La Cloche, c’est la seule association où on peut prendre le temps de discuter comme ça en ce moment. »
Le soleil glisse doucement vers l’horizon mais les parties sont toujours en cours square du président Allende, attirant l’attention d’un passant. « Vous venez pour le tournoi ? » demande Gabrielle. « Non non », répond le monsieur qui assure ne faire « que passer » mais demande si c’est payant. Il revient finalement une heure plus tard pour une partie de pétanque et jette un coup d’œil aux listes, prospectus et badges de l’association posés sur une table. La directrice se tient prête à parler de la Cloche si besoin. « On cherche toujours des bénévoles », explique-t-elle. Les sympathisants sont aussi les bienvenus. « Beaucoup de gens n’ont pas forcément l’envie ou le temps d’être bénévoles, détaille Laura de son côté. Mais pour aider, il est toujours possible d’offrir un café suspendu, ou de participer à ce type d’événements. “
> La Page Facebook de la Cloche Grand Est <>> La Page Facebook de la Cloche Grand Est <<
Victoire PIROT
*Le prénom a été changé